Les modèles animaux permettent aux scientifiques d’étudier les maladies humaines en laboratoire. Ils aident les scientifiques à mieux connaître les changements biologiques qui surviennent lors de l’apparition et de la progression de la maladie, et ils peuvent accélérer l’identification de traitements prometteurs qui seront testés dans des essais cliniques sur des humains par la suite.

En 2005, lorsqu’il était encore un étudiant de troisième cycle, le DGary Armstrong a assisté à une conférence de la Society for Neuroscience à Washington, D.C. Il a choisi d’assister à une présentation sur la SLA, car il s’agissait d’une maladie qu’il ne connaissait pas bien. Le DDon Cleveland, un chercheur éminent sur la SLA, donnait la présentation. « Le Dr Cleveland a affirmé que c’était excellent que des scientifiques aient créé de nouveaux modèles de souris d’une forme humaine de la SLA génétique, mais que le milieu avait besoin que des experts étudient les processus de signaux électriques entre les motoneurones et les muscles », raconte le Dr Armstrong. « J’avais une formation spéciale en électrophysiologie, l’étude des signaux électriques entre les cellules. Sa présentation a vraiment provoqué ma décision de concentrer mes recherches sur les jonctions neuromusculaires dans la SLA. »

Des modèles de poissons-zèbres de la SLA

Aujourd’hui, le Dr Gary Armstrong est neuroscientifique et professeur adjoint à l’Institut neurologique de Montréal de l’Université McGill. Il a publié de nombreux articles sur la perte de communication entre les motoneurones et les muscles aux jonctions neuromusculaires, les petits endroits où les motoneurones se connectent aux fibres musculaires individuelles.

Grâce à ces travaux, le Dr Armstrong a réussi à créer des modèles de poissons-zèbres de la SLA humaine avec des mutations des gènes TARDP et FUS, deux des mutations associées à la SLA héréditaire. Le très petit poisson-zèbre mesure seulement six centimètres, mais c’est un excellent animal pour étudier la SLA, et ce, pour de nombreuses raisons. Comme les humains, il a les mêmes gènes qui fournissent les plans pour produire les protéines TDP-43 et FUS associées à certaines causes génétiques connues de la SLA chez les humains. Le poisson-zèbre devient rapidement un adulte en quelques jours; ainsi, il est possible de mener des expériences en laboratoire assez rapidement. Il est transparent, ce qui permet aux chercheurs d’étudier facilement leur anatomie de façon détaillée. « Sous un microscope, je peux voir la moelle épinière, puis me rapprocher encore plus pour voir les jonctions neuromusculaires », affirme le Dr Armstrong. « Le poisson-zèbre est merveilleux au niveau biologique, il ressemble à un petit pretzel. »

Un nouvel outil d’édition génétique puissant

Auparavant, le Dr Armstrong a réussi à créer des poissons-zèbres génétiquement modifiés pour exprimer les mutations humaines des gènes TDP-43 et FUS à l’aide d’une technologie d’édition génétique standard qui consiste à insérer un gène humain de la SLA dans un embryon de poissons-zèbres afin qu’ils reproduisent les signes et les symptômes de la maladie. Toutefois, cette méthode comporte certains inconvénients, notamment la difficulté à contrôler précisément l’endroit où le gène modifié est inséré, et la composition d’une protéine humaine anormale, qui est normalement produite en plus grande quantité chez les humains atteints de la SLA.

En 2012, des chercheurs ont découvert un nouvel outil d’édition génétique puissant appelé CRISPR-Cas9 (« CRISPR ») qui a révolutionné la recherche en laboratoire à l’échelle mondiale. Il fonctionne comme une paire de ciseaux moléculaires, coupant l’ADN à un endroit particulier pour enlever un gène défectueux afin de pouvoir insérer un nouveau gène. CRISPR est une technique beaucoup plus rapide et moins chère pour fabriquer des modèles animaux génétiquement modifiés de la maladie comparativement aux anciennes méthodes.  De plus, en insérant une mutation directement dans un gène existant d’un poisson-zèbre, cela crée un modèle animal qui comporte la quantité appropriée de protéines anormales, au lieu des niveaux élevés non naturels.

Le Dr Armstrong a tout de suite réalisé que CRISPR pouvait lui permettre d’améliorer les modèles de poissons-zèbres pour la SLA. Mais premièrement, il devait trouver une façon de modifier la technique CRISPR pour couper et coller un seul des blocs de construction qui forment l’ADN, un seul nucléotide, et non un gène entier comprenant une séquence de nucléotides, afin de pouvoir modéliser d’aussi près que possible les mutations génétiques observées chez les humains atteints de SLA.  « Imaginez une paire de ciseaux qui coupe des mots dans une phrase du code de l’ADN. Avec la technique CRISPR régulière, nous pouvons couper le mot « thé ». Mais nous devions couper seulement la lettre la lettre « t » afin de réduire « thé » à « hé », ce qui permet de modéliser de façon plus précise les mutations de nucléotides uniques qui causent la SLA », affirme le DArmstrong. « Mes collègues et moi avons essayé plusieurs fois d’y arriver. Nous avons finalement réussi, et ce fut l’un des moments les plus heureux de ma carrière de chercheur jusqu’ici. »

Faire progresser la recherche sur la SLA

Grâce à une subvention de projet de 125 000 $ du programme 2018 de recherche de la Société canadienne de la SLA, qui s’ajoute à deux subventions précédentes — une bourse de transition de carrière de la Société canadienne de la SLA en 2015 et une bourse de découverte de la Société canadienne de la SLA et de la Fondation Brain Canada en 2016 — le Dr Armstrong utilisera sa technique CRISPR novatrice pour créer des modèles de poissons-zèbres comportant les mutations génétiques TDP-43 et FUS de la SLA. Il déterminera si les modèles CRISPR sont meilleurs que ceux créés à l’aide de la technique d’édition génétique traditionnelle en mesurant leur activité en boîte de Pétri au fil du temps à l’aide d’un système de saisi de données automatisé qu’il a déjà créé. Il examinera les poissons pour voir si l’édition génétique fonctionne comme prévu et s’ils développent les protéines TDPS-43 et FUS mutées, ainsi que les défauts dans les jonctions neuromusculaires de leur moelle épinière.

S’il réussit, ce projet fera avancer les recherches futures sur la SLA de deux façons. Premièrement, cela validera cette technique CRISPR modifiée, pavant ainsi la voie à son utilisation pour créer des modèles plus précis de la SLA dans d’autres animaux, comme les souris, pour les recherches futures.

Deuxièmement, le DArmstrong pourrait intensifier la production de modèles de poissons-zèbres CRISPR de la SLA et les utiliser pour étudier des médicaments. Comparativement aux autres modèles animaux, l’étude de médicaments avec des poissons-zèbres est beaucoup plus rapide, car ils se développent très rapidement, et les médicaments expérimentaux peuvent être ajoutés directement dans l’eau, ce qui permet de traiter plusieurs poissons à la fois au lieu d’un animal à la fois.

« Notre innovation pourrait aider d’autres chercheurs à développer de meilleurs modèles animaux de la SLA et ainsi permettre à des thérapies prometteuses de passer beaucoup plus rapidement à la phase des essais cliniques », indique le Dr Armstrong.

Ce projet de recherche est l’un des huit projets de recherche financés en 2018 par le programme de recherche de la Société canadienne de la SLA, qui constitue la seule source de financement dédiée à la recherche sur la SLA au Canada. Le financement du projet a suivi un processus rigoureux d’évaluation scientifique par des comités de spécialistes internationaux de la SLA. Les membres de ces comités ont évalué un grand nombre de candidatures pour repérer les projets qui font preuve d’excellence scientifique et qui ont le potentiel de faire progresser le plus rapidement le champ de recherche de la SLA afin de mettre au point des traitements efficaces.

La Société canadienne de la SLA est un organisme de bienfaisance enregistré qui ne reçoit aucun financement public. Tout ce qu’elle fait – du financement de la recherche au soutien communautaire des personnes aux prises avec la SLA – est rendu possible uniquement grâce à la générosité des donateurs et aux partenariats avec les sociétés provinciales de la SLA qui contribuent à son programme de recherche.

Nous vous invitons à envisager de faire un don pour contribuer à un avenir sans SLA.

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