Notre compréhension de la SLA provient presque exclusivement de l’étude d’une très petite partie du monde. L’étude de la génétique des personnes atteintes de SLA a permis de réaliser certains des plus grands progrès dans nos connaissances à ce jour, mais la plupart des populations génétiquement diverses du monde ne figurent nulle part dans les bases de données utilisées. Malheureusement, de nombreuses populations mondiales sous-représentées ne disposent pas des infrastructures nécessaires pour assurer des soins de qualité, sans parler de la recherche. En outre, il est difficile d’entreprendre des recherches dans bon nombre de ces régions. La plupart du temps, il faut qu’un médecin ou un défenseur local se charge de créer une fondation dans la région qui aborde la valeur de la recherche d’une manière adaptée à la culture régionale.
L’histoire montre que des investissements critiques et opportuns dans le travail de cliniciens de premier plan dans la recherche sur la SLA peuvent contribuer grandement à stimuler des investissements de suivi plus importants qui ouvrent la voie à une croissance et à un impact exponentiel. Ce travail initial implique souvent une collaboration entre des experts provenant de régions du monde bien soutenues et des experts cliniciens locaux afin de mettre au point les mécanismes appropriés au sein de leurs systèmes et de leur culture.
L’Amérique du Sud et l’Afrique sont des continents massifs et très peuplés, dont l’utilisation du terme « sous-représenté » dans la recherche sur la SLA est un euphémisme. Cependant, le travail de certaines personnes clés au cours des dernières années a permis de positionner les deux continents sur la voie d’une contribution à notre compréhension globale de la SLA potentiellement significative.
L’une de ces personnes est la professeure Mónica Povedano de Hospital Universitario de Bellvitge à Barcelone, en Espagne, qui, en collaboration avec la professeure Orla Hardiman de Trinity College Dublin, travaille avec des collègues de Colombie et d’Éthiopie à la mise en place d’infrastructures cliniques et de recherche en Amérique du Sud et en Afrique du Nord.
Afin de soutenir ce travail, une Subvention d’accélération de la Société canadienne de la SLA a été accordée à la professeure Povedano pour sa collaboration avec la Dre Martha Peña de Roosevelt Institute à Bogota, en Colombie, et le Dr Dereje Melka d’Addis Ababa University, en Éthiopie, dans le but de renforcer leurs capacités de recherche en développement grâce à la toute première étude comparative dans ces divers milieux ethniques, en parallèle avec des données provenant d’individus européens. L’étude se concentrera d’abord sur les différences de distribution et de caractéristiques entre les groupes, tout en utilisant des mesures validées de la maladie et de la génétique pour effectuer ces comparaisons. En Amérique du Sud, certains travaux fondamentaux ont été lancés par la professeure Hardiman en collaboration avec le Latin-American Epidemiologic Network for ALS (LAENALS). De même, la professeure Povedano travaillera en étroite collaboration avec LAENALS.
Mise à jour :
Les choses ont déjà évolué en Amérique du Sud au cours des premiers mois de leur financement par la Subvention d’accélération de la Société canadienne de la SLA. En septembre 2023, la Dre Peña, la professeure Povedano et la professeure Hardiman ont organisé la réunion inaugurale d’un nouveau réseau sud-américain de cliniciens de SLA appelé ELATAM. En Afrique, un réseau de cliniques se développe également grâce à la professeure Jeannine Heckmann au Cap, en Afrique du Sud. L’octroi d’un financement de départ pour soutenir la recherche éthiopienne peut, à terme, contribuer à l’élan du continent.
Le Dr David Taylor, vice-président de la recherche et des partenariats stratégiques de la Société canadienne de la SLA, estime que cette subvention d’accélération vient au moment idéal. « L’intégration des contributions des secteurs sous-représentés sera essentielle à notre compréhension et à notre capacité à traiter la SLA, et cela n’est pas possible sans investissements initiaux pour jeter les bases. Nous devons saisir l’occasion qui nous est offerte d’avoir des leaders solides dans ces domaines et les aider à développer et à faire évoluer les capacités de recherche afin que le monde puisse en bénéficier le plus rapidement possible. »
La contribution mondiale favorise le Canada
En plus de tirer des enseignements des statistiques sur la maladie, de la génétique et de l’impact de l’environnement dans ces régions, le développement de l’infrastructure nécessaire aux essais cliniques est un scénario gagnant-gagnant pour les personnes touchées par la SLA dans ces régions et pour celles du monde entier (y compris le Canada). Les essais menés dans les régions sous-représentées permettront à ces pays d’avoir accès à des traitements expérimentaux potentiellement bénéfiques et accéléreront les possibilités de découvrir des traitements accessibles au Canada en cas de succès.
Un exemple actuel de ce bénéfice mutuel réside dans les traitements pour les personnes atteintes de SLA SOD1, une forme causée par une variante du gène de la superoxyde dismutase 1. Un traitement efficace appelé tofersen est approuvé sous le nom de Qalsody aux États-Unis, ainsi que dans de nombreux pays par le biais de programmes d’accès élargis mis en place par Biogen. Bien que le tofersen soit bénéfique, de nombreuses entreprises tentent d’améliorer son succès en ciblant la SLA SOD1 avec des méthodes d’administration potentiellement plus robustes et moins lourdes ou invasives. Les études devront recruter des individus pour savoir si ces nouvelles options peuvent apporter une plus grande valeur ajoutée, mais cela ne sera pas facile dans les régions où le tofersen est déjà disponible. Cependant, dans les cliniques d’Afrique et d’Amérique du Sud où il y a un grand nombre de personnes atteintes de SLA SOD1, ces nouveaux traitements expérimentaux pourraient être accessibles aux personnes locales alors que le reste du monde tire des enseignements de leurs participations à ces études.
La nature progressive de la SLA impose l’urgence de nos tentatives scientifiques pour comprendre la maladie, alors que sa complexité implique des stratégies à plus long terme qui pourraient avoir un impact significatif, constituant ainsi des éléments complémentaires importants. Nous devons aborder la SLA sous tous les angles, et les enseignements tirés des régions du monde qui nous restent à étudier fourniront sans aucun doute des informations cruciales pour la réalisation de notre vision d’un monde sans SLA. Cette Subvention d’accélération nous permet d’investir stratégiquement dans des travaux qui, à terme, amèneront des continents entiers à participer à l’effort mondial, accélérant ainsi l’impact sur les futurs diagnostics de la maladie au Canada.