Bienvenue à la mise à jour d’octobre 2019 sur la recherche sur la SLA. Ce mois-ci, vous en apprendrez davantage sur les progrès réalisés par les chercheurs qui transforment la manière dont les essais cliniques sont menés, comprennent les rôles que peuvent jouer le microbiome et l’agrégation de protéines dans la SLA et identifient les mécanismes par lesquels différents gènes peuvent contribuer à développer la maladie.
Le microbiome intestinal joue-t-il un rôle dans la progression de la SLA?
Une étude récente suggère qu’une substance en particulier, produite par des bactéries naturellement présentes dans nos intestins, peut ralentir la progression de la SLA chez la souris.
Le microbiome intestinal est responsable de la collecte naturelle des micro-organismes (bactéries, virus, champignons, etc.) qui vivent dans notre tractus gastro-intestinal. Le microbiome intestinal joue un rôle important dans l’absorption des nutriments et des minéraux, ainsi que dans la santé globale des intestins. Cependant, de plus en plus de preuves suggèrent récemment que le microbiome intestinal peut également jouer un rôle dans la vulnérabilité aux maladies, notamment les maladies du cerveau.
Lors d’une étude récemment publiée dans la revue Nature, un modèle murin qui imite la SLA a reçu des antibiotiques à large spectre afin de mieux comprendre les effets du retrait d’une grande partie du microbiome intestinal. Les résultats ont démontré que le traitement utilisant des antibiotiques aggrave les symptômes de la maladie.
À l’aide de méthodes de calcul avancées, les chercheurs ont ensuite comparé la composition du microbiome intestinal de souris touchées par la SLA à celle de souris en bonne santé. Ils ont découvert que 11 souches bactériennes différentes pouvaient jouer un rôle dans la progression de la SLA. Pour tester individuellement leurs effets, ces souches bactériennes ont été rendues une à une aux souris atteintes de SLA préalablement traitées avec des antibiotiques. Ils ont constaté qu’une souche bactérienne, appelée Akkermansia muciniphila (AM), ralentissait de manière considérable la progression de la maladie et offrait une survie prolongée chez les souris.
Ce travail représente une étape majeure dans l’identification des facteurs environnementaux pouvant influencer la progression de la SLA. Les chercheurs reconnaissent toutefois que cette étude est préliminaire et que de futures études plus vastes sont nécessaires pour améliorer notre compréhension de l’impact potentiel du microbiome sur la SLA chez les humains ainsi que de la manière dont il pourrait être exploité afin de développer de nouvelles options thérapeutiques.
Aperçu d’une autoroute moléculaire dans les motoneurones pouvant être perturbés par la SLA
Les chercheurs ont identifié un rôle clé pour la protéine ANXA11 liée à la SLA dans le transport de l’ARN dans les neurones moteurs.
Ce rôle fait le lien entre plusieurs avenues importantes de notre compréhension de la SLA et représente un pas en avant important dans notre capacité à identifier de nouvelles cibles pour développer des options de traitement.
Les motoneurones sont les fils vitaux de notre corps qui transmettent les signaux de notre cerveau à nos muscles, ce qui nous permet de nous déplacer. Les motoneurones peuvent être amenés à porter des signaux sur de longues distances et peuvent être très longs, certains pouvant mesurer jusqu’à un mètre de long.
En raison de la taille et de la forme des motoneurones, le transport efficace de substances dans la cellule, telles que l’ARN, est très important pour le maintien d’une bonne santé. L’ARN contient des renseignements génétiques copiés à partir de l’ADN qui se trouve dans le noyau du corps cellulaire. Puisque l’ARN dirige la formation de protéines et que la formation de protéines est nécessaire dans toutes les parties de la cellule (même à l’extrémité de l’axone, comme on le voit sur l’illustration), l’ARN doit parcourir de longues distances jusqu’à l’endroit où il est nécessaire. La façon dont l’ARN est transporté dans ces régions lointaines est actuellement mal comprise.
Lors d’une nouvelle étude publiée dans la revue Cell, une équipe de chercheurs a constaté que la protéine ANXA11 peut jouer un rôle important dans la fixation de l’ARN dans les structures qui peuvent le transporter vers des sites distants dans le motoneurone. Les chercheurs décrivent l’ARN comme faisant de « l’auto-stop » sur d’autres structures en mouvement dans la cellule. On pense que les mutations de la protéine ANXA11 liées à la SLA altèrent sa capacité à lier l’ARN à ces structures en mouvement. Financée en partie par une bourse d’équipe translationnelle Arthur J. Hudson de la Société canadienne de la SLA et de la Fondation Brain Canada, cette étude identifie une fonction cellulaire essentielle qui peut être perturbée lorsqu’on est atteint de SLA.
Les chercheurs identifient un nouveau gène qui pourrait devenir une cible thérapeutique pour la SLA liée au gène C9orf72
Une nouvelle étude suggère qu’un gène en particulier, le RPS25, peut être un acteur clé de la toxicité associée aux mutations du gène C9orf72 provoquées par la SLA.
Au sein des cellules, ces mutations conduisent à la production de protéines destructrices appelées RMR. Ces protéines RMR ont tendance à s’agglutiner dans les cellules et à s’accumuler dans le système nerveux central des patients atteints de SLA liée au gène C9orf72.
L’étude publiée dans la revue Nature Neuroscience explique comment les chercheurs sont parvenus à identifier les gènes qui peuvent être en mesure de réguler la production de RMR dans les cellules. Ils ont d’abord analysé tous les gènes dans les cellules de levure et en ont identifié 42 qui sont capables d’augmenter ou de diminuer les concentrations de RMR. Ils ont découvert qu’en réduisant un gène en particulier, appelé le RPS25, ils étaient capables de diminuer de 50 % la concentration de ces protéines toxiques dans les cellules de levure.
Pour déterminer si les résultats des cellules de levure peuvent être transposés aux humains, les chercheurs ont ensuite étudié les effets du gène RPS25 dans les motoneurones dérivés de cellules souches de patients atteints de SLA. Une fois encore, les chercheurs ont découvert que le blocage du gène RPS25 dans les cellules humaines entraînait une diminution des concentrations totales de RMR et une augmentation de la survie cellulaire. Pour valider davantage le rôle du gène RPS25 dans la SLA, les chercheurs ont également utilisé un modèle de drosophiles atteintes de SLA et ont constaté que la réduction de la quantité de RPS25 augmentait la durée de vie de la mouche.
Ce travail fournit une meilleure compréhension de la façon dont les protéines RMR toxiques sont fabriquées dans les cellules et potentiellement comment les chercheurs peuvent entraver ce processus. L’étape suivante consiste à tester ces résultats sur d’autres modèles animaux. Les chercheurs ont noté qu’il était important de déterminer si des animaux plus complexes, tels que les souris et les rats, pouvaient survivre sans le gène RPS25, car il pourrait avoir de nombreuses fonctions supplémentaires et possiblement importantes au sein d’une cellule.
Une nouvelle façon révolutionnaire de mener des essais cliniques sur la SLA
Le Sean M. Healey & AMG Centre pour la SLA (le Centre Healey) au Massachusetts General Hospital lancera la première plateforme d’essai clinique sur la SLA.
Le Centre Healey lancera la plateforme d’essai au sein de 54 sites à travers les États-Unis proposant trois traitements pour commencer, puis en ajoutant deux autres traitements peu de temps après. Les chercheurs sont enthousiastes à l’idée de cette nouvelle approche, car ils sont convaincus que la possibilité de tester plusieurs médicaments en même temps permettra au monde de trouver plus rapidement un traitement contre la SLA.
Une plateforme d’essai est un essai clinique où plusieurs traitements sont testés et évalués en même temps. Les plateformes d’essai contribuent à accélérer le développement de médicaments tout en permettant aux chercheurs de tester plus de médicaments, d’accroître l’accès des patients aux essais et de réduire les coûts. Une étude précédente qui se concentrait sur l’efficacité des plateformes d’essais cliniques a démontré que le modèle de plateforme pourrait aider les scientifiques à trouver des traitements bénéfiques en utilisant moins de patients, en moins de temps et avec une plus grande probabilité de succès. De nouveaux traitements peuvent être ajoutés à une plateforme d’essai dès qu’ils sont disponibles et, étant donné que le groupe placebo de chaque étude impliquée peut être partagé, les participants auront plus de chances de recevoir un médicament actif qu’un placebo.
Avant de lancer la plateforme d’essai HEALEY ALS, le Centre Healey a lancé un appel mondial pour trouver les meilleures idées de traitement et a reçu 30 candidatures provenant de 10 pays. Un groupe d’experts scientifiques travaillant sur la SLA a examiné les candidatures et a sélectionné les cinq meilleures idées qui étaient appliquées dans le cadre de la plateforme d’essai. Les traitements expérimentaux comprennent le CNM-AU8 (Clene Nanomedicine), l’IC14 (Implicit Bioscience), la pridopidine (Prilenia), le verdiperstat (Biohaven Pharmaceuticals) et le zilucoplan (Ra Pharmaceuticals).
Une étude suggère que l’agglutination de la protéine TDP-43 couramment observée dans la SLA pourrait protéger les cellules
Les chercheurs se demandent depuis longtemps si les amas de protéines présents dans les cellules atteintes de nombreuses maladies neurodégénératives sont toxiques ou protecteurs. Une nouvelle recherche sur la SLA suggère qu’ils pourraient être protecteurs.
Les protéines qui s’agglutinent dans les cellules constituent une caractéristique propre à de nombreuses maladies neurodégénératives. Par exemple, des amas d’une protéine appelée TDP-43 sont trouvés dans presque tous les cas de SLA. Récemment, des scientifiques ont découvert que ces protéines pouvaient également se rassembler dans un état liquide avant de s’agglutiner. Le débat reste ouvert pour savoir quelle forme est la plus toxique.
Dans une nouvelle étude parue dans la revue Nature Communications, les chercheurs ont entrepris de déterminer quelle forme de TDP-43 entraîne une toxicité cellulaire. Ils ont créé plus de 50 000 formes anormales différentes de TDP-43 en modifiant un ou deux acides aminés (les éléments constitutifs des protéines) à la fois et ont analysé leur toxicité dans les cellules de levure. Les chercheurs ont estimé qu’en étudiant toutes les formes possibles de la protéine, ils obtiendraient une compréhension beaucoup plus fiable de son comportement.
Fait intéressant, ils ont constaté que les changements favorisant l’agglutination de la protéine TDP-43 étaient en réalité moins toxiques dans le modèle de levure. D’un autre côté, les changements favorisant la forme liquide de la protéine TDP-43 augmentaient sa toxicité. Cela a conduit les chercheurs à conclure que l’agglutination de la protéine TDP-43 n’est pas nocive pour les cellules et peut plutôt constituer un mécanisme de protection en éloignant les protéines d’une forme plus toxique dans les amas.
Il est important pour les chercheurs de valider ces résultats avec les motoneurones humains afin de confirmer un effet protecteur dans les cellules plus étroitement liées à la maladie humaine. S’ils arrivent à confirmer cette hypothèse, cela pourrait changer radicalement la manière dont la SLA et les autres maladies neurodégénératives sont traitées à l’avenir puisque de nombreux traitements ont pour but de réduire ce qui s’avère maintenant être des amas de protéines protecteurs.